Il y a un an tout juste, le 6 mai 2021, notre Maxus 24 baptisé « Amor Fati » plongeait ses deux appendices pour la première fois dans les eaux froides de la Mer Baltique. Une journée peu ordinaire qui a ouvert le récit de nos aventures que vous avez bien voulu traverser avec nous via ce blog le printemps et l’été dernier.
Aujourd’hui, le 6 mai 2022, nous sommes heureux de vous annoncer la parution de notre livre : Le Voyage d’Amor Fati. Notre carnet de voyage couché sur le papier en 240 pages illustrées de photos, de cartes et de quelques dessins des enfants.
A l’heure où nos photos n’ont plus qu’une durée de vie numérique (c’est-à-dire au maximum quelques années pour les plus soigneux d’entre nous), ce livre est d’abord l’occasion de conserver une trace écrite de cette tranche de vie partagée. Un souvenir pour les enfants et pour nous, ainsi que celles et ceux qui nous ont suivis sur ce blog.
Le Voyage d’Amor Fati de Alexandre Autexier Une auto-édition tirée en 100 exemplaires. Ouvrage avec couverture cartonnée de 240 pages couleurs. Prix de vente : 39 €
Extrait
6 mai 2021 / Port de Västervik – Suède Une fois n’est pas coutume, commençons par la fin. Tout ne s’est pas passé exactement comme prévu cette première semaine… Nous voilà malgré nous installés confortablement pour quelques jours dans une jolie GuestHouse du port de Västervik en Suède. Face à la marina de Slottsholmen, les enfants font leurs devoirs sous le regard attentif de Claire.Pendant ce temps, je regarde ma main gauche. A côté d’un auriculaire gonflé et douloureux, une grosse poupée cache le bout de mon annulaire, désormais raccourci de quelques centimètres. Autre constat : l’eau de la mer Baltique en ce début mai est encore très froide… Bref, tout ne s’est pas passé comme prévu.
Si certains d’entre vous veulent se procurer le livre, merci de nous envoyer un mail avec votre adresse via le formulaire de contact du site en cliquant ici ! Règlement par virement et envoi par Colissimo La Poste directement dans votre boîte aux lettres en 2 jours (8,65 € de frais d’envoi en sus) ou via Mondial Relay (6,40 € de frais d’envoi en sus).
Ce mardi 27 juillet au matin, c’est seul à bord d’Amor Fati que je quitte le ponton de la marina de Västervik. Le mât est à l’horizontal, bien fixé dans la longueur du bateau, prêt pour le voyage du retour. Je redescends tranquillement le fjord au moteur pour ces 4 miles qui me séparent du petit chantier familial où nous allons gruter le bateau. Claire et les enfants m’y attendent avec la voiture. Je profite de ces derniers instants sur la Baltique dans une ambiance inhabituellement silencieuse, avec un bon café à la main. Une fois amarré au ponton de service, nous terminons de vider le bateau avec Claire. Nous sommes ravis de retrouver l’équipe du chantier qui s’empresse de prendre de nos nouvelles et de jeter un coup d’oeil sur la cicatrisation de mon doigt. Quelques minutes plus tard, la remorque est en place, les élingues sont glissées sous la carène du bateau, parées au levage. Amor Fati prend son envol et vient se caler parfaitement sur ses chandelles. Il ne reste plus qu’à démonter le moteur et à installer les sangles pour fixer le bateau sur la remorque. Tout le monde est au petit soin avec moi. A chaque fois que je m’approche de mon bateau, on me demande d’être prudent. Si je suis d’abord touché par l’attention, je fini par m’en agacer intérieurement, mais comment leur en vouloir après mon accident lors de la mise à l’eau trois mois plus tôt… A la fin de la matinée, la voiture est chargée, et le bateau et sa remorque prêts à voyager. Le départ est prévu le lendemain matin. D’ici là, nous profitons de l’après-midi à Västervik, et nous offrons une soirée au restaurant. A 21 heures, nous nous effondrons dans le grand lit de la dernière chambre disponible de la Guest-House de Västervik. Pour la première fois depuis trois mois, Claire peut enfin déployer à sa guise ses grandes guiboles sous la couette, et je n’aurai pas à dormir avec l’épaule et le bras sur la caisse à outils (ma petite technique personnelle pour gagner quelques centimètres de plus en largeur sur notre couchette dans le bateau). A 21h05, je dors déjà comme un bébé.
Après Paul 10 jours plus tôt, ce mercredi 28 juillet, c’est au tour de Blanche de fêter son anniversaire ! Ce matin, Boubou a cinq ans, et se réveille avec la fière impression « d’être une grande » ! Nous profitons de l’énorme buffet de petit-déjeuner de la Guest-House pour lui offrir ses cadeaux : une jolie petite robe et une poupée Reine des Neiges. Vient ensuite l’heure du départ. Les conditions sont parfaites et nous avalons en quelques heures les 500 kms qui nous séparent de Trelleborg, tout au sud de la Suède. L’embrayage de la voiture semble tenir le coup, et nous arrivons à la gare de ferry en fin d’après-midi. Nous embarquons ensuite vers 20 heures et, après un rapide passage par notre petite cabine, nous gagnons le bar du ferry pour un petit apéro d’anniversaire. Les enfants sont excités de retrouver les longs couloirs du Nils Holgersson et ses dessins de frégates qui les décorent. Le ferry largue les amarres vers 22 heures alors que tous les enfants du bord se sont regroupés dans la salle de cinéma où est projeté La Reine des Neiges en version allemande.
La nuit est courte et peu confortable. Les ressorts des vieux matelas nous ont massé les côtes pendant ces quelques heures de sommeil. A 7h30 ce jeudi 29 juillet, nous descendons la rampe du ferry à Travemünde et attaquons une longue traversée en voiture. Les trois derniers épisodes du podcast de France Inter consacré à Napoléon nous accompagne pour le début de la traversée de l’Allemagne. Quand nous arrivons en Belgique dans l’après-midi, nous avons déjà pas mal épuisé le stock d’émissions disponibles de Blockbusters. Une fois en France, je suis déjà en overdose de radio… Les prévisions de trafic du vendredi sont pessimistes, et Bison Futé voit rouge dès le matin dans la région parisienne. Les enfants étant toujours aussi adorables après 12 heures de route, nous décidons de continuer notre voyage et, à minima, de passer la région parisienne avant de faire escale. Après une pause d’une petite heure pour dîner, nous arrivons sur Paris vers 22 heures. Le trafic est très dense malgré l’heure tardive et plusieurs portions d’autoroutes semblent temporairement fermées pour travaux : la promesse d’une belle punition au volant de notre attelage… Après quelques minutes, nous nous retrouvons bien malgré-nous sur le périphérique parisien avec notre bateau qui n’en demandait pas tant ! Après la grande caravane Airstream de Petzl il y a quelques années, me revoilà avec un gros attelage sur cette maudite voie qui n’a de rapide que le nom ! Notre calvère prend fin plus d’une heure plus tard lorsque nous rejoignons enfin l’A10. Les enfants se sont endormis, et nous décidons d’essayer de continuer la route sans arrêt jusqu’à notre destination. Nous souhaitons passer quelques jours à la campagne à Luchapt, un petit village du sud de la Vienne où ma Maman habite. Le grand jardin sera idéal pour nettoyer complètement le bateau et les enfants seront ravis de retrouver leur grand-mère et leurs Lego et Playmobil. Avant cela, il reste un peu plus de 300 km à parcourir. Vers 00h30, nous faisons halte sur une aire d’autoroute autour d’Orléans. Après quelques minutes de pause et un énième café englouti, je me remets au volant : impossible de re-démarrer. D’avis d’un très sympathique routier, la batterie a rendu l’âme. Je file à la station service et, à défaut de batterie, trouve une paire de pinces crocodile. Je sors l’échelle du coffre et monte à bord du bateau pour démonter la batterie de démarrage du moteur hors-bord. Celle-ci ne fait que 60 ampères quand celle de notre voiture en fait 95… Espérons qu’elle suffira malgré tout à démarrer. Après l’avoir connectée grâce aux pinces, c’est concentré et plein d’espoir que je tourne la clé : après une très légère hésitation, le moteur s’élance puis tourne. L’alternateur prend le relais et tout fonctionne maintenant normalement. En revanche, plus question de couper le moteur jusqu’à notre arrivée. Les enfants se rendorment aussi sec et les kilomètres s’enchainent dans une nuit bien noire dont nous avons perdu l’habitude. Le vendredi 30 juillet à 4h30 du matin, 21 heures après avoir quitté le ferry et roulé presque 1 500 km, nous arrivons à destination. Les enfants sont heureux de retrouver le dortoir de la grande maison familiale, et nous les rejoignons dans les bras de Morphée vers 5h.
Nous profitons des trois jours suivants pour d’abord souffler un peu, puis pour nettoyer l’intérieur du bateau qui en a bien besoin. Nous nous attaquons ensuite au décapage de la coque sur laquelle la forte concentration de pollen dans la Baltique a laissé des traces de coulures cuivrées. L’opération demande pas mal d’huile de coude. Le mardi 3 août au matin, nous laissons les enfants à ma mère et quittons Luchapt avec Claire en direction de La Rochelle. Drôle de sensation de nous retrouver seulement en couple après ces trois mois passés tous les quatre. Cette vie en famille à chaque instant est finalement assez inhabituelle de nos jours, et tout s’est suffisamment bien passé pendant ce voyage pour que nous ressentions l’absence des enfants presque comme un manque. Nous arrivons en fin de matinée sur La Rochelle, dans une ambiance et une météo digne d’un mois de novembre… Nous nous installons sur le plateau nautique en mode « pirate » et, grâce à l’aide de quelques amis, terminons le nettoyage de la coque par un coup de polish pour éliminer les rayures et lui apporter un peu de brillant et de protection. Vers 17h, le bateau est pris en charge par la grue du Port des Minimes et retrouve l’eau -un peu plus salée et surement pas beaucoup plus chaude- de l’Atlantique. Cinq minutes plus tard, nous regagnons notre place habituelle et, avec l’aide de nos amis Eric et Fred, re-mâtons le bateau dans la foulée. Deux jours plus tard, le bateau est à nouveau accastillé, et le pont a lui aussi retrouvé un peu de sa blancheur.
Le bateau est à nouveau prêt à naviguer pour de nouvelles aventures locales dans les pertuis, dès la rentrée. En attendant, comme dans une bande-dessinée d’Astérix et Obélix, nous allons terminer cette aventure autour d’un bon banquet. Il est évidemment un peu tôt pour tirer tout les enseignements et faire le bilan de ce voyage. Si les circonstances le permettent, peut-être que nous aurons l’occasion dans les prochains mois de raconter et partager ce voyage, à La Rochelle ou ailleurs. Nous proposerons également une nouvelle page avec quelques informations pratiques à destination d’équipages qui pourraient être tentés par une navigation en Mer Baltique : ce qui a marché comme ce qui a plus ou moins raté. Nous réaliserons également une cartographie globale de notre parcours.
D’ici là, merci de nous avoir lu et accompagné à distance dans cette petite aventure familiale. Merci également à nos partenaires, Tribord, Katadyn France et Récréation La Rochelle, dont le matériel a fait partie de notre quotidien pendant ces trois mois, et grâce à qui nous sommes restés au chaud et au sec, avons décoré la coque du bateau, résisté aux attaques des moustiques scandinaves, allumés des feux dans toutes les conditions, pansés tous les bobos…
Et comme dans un épisode de Radio Boubou, « on vous fait plein de coeurs, plein de bisous » !
Une fois n’est pas coutume, commençons par la fin. Tout ne s’est pas passé exactement comme prévu cette première semaine… Nous voilà malgré nous installés confortablement pour quelques jours dans une jolie GuestHouse du port de Västervik en Suède. Face à la marina de Slottsholmen, les enfants font leurs devoirs sous le regard attentif de Claire. Pendant ce temps je regarde ma main gauche : à côté d’un auriculaire gonflée et douloureux, une grosse poupée cache le bout de mon annulaire, désormais raccourci de quelques centimètres. Autre constat : l’eau de la mer Baltique en ce début juin est encore très froide…
Bref, tout ne s’est pas passé comme prévu.
Revenons quelques jours en arrière, avant notre départ de La Rochelle. Etant donné le contexte sanitaire actuel et les différentes restrictions et conditions de circulation qui sévissent en Europe, nous devons composer avec pas mal de contraintes pour ce convoyage par la route : – Interdiction de passer une nuitée touristique en Allemagne. – Obligation d’un test PCR Négatif de moins de 48h pour entrer sur le territoire Suédois (et d’après le site de l’Ambassade de France en Suède, on ne transige pas avec cette règle). L’équation est compliquée, mais sur le papier « ça passe » !
Le lundi 3 mai, dès la levée des restrictions de circulation en France, nous sommes à 8h au test Covid « drive » de La Rochelle. A 9h, la remorque et le bateau sont attelés, et nous quittons le quartier de La Pallice pour entamer notre périple de 2 000 kilomètres.
Une première journée où nous restons concentrés pour apprivoiser cette nouvelle remorque. Je suis seul à pouvoir conduire l’attelage, mais Claire s’occupe de l’ensemble de la logistique et les enfants et moi ne manquons de rien : petits cafés à volonté, M&M’s, programmation musicale à base de podcast originaux de France Inter. Il fait grand beau, pas de vent, les kilomètres défilent ! Après un contournement pénible de Paris (c’est un pléonasme), cap vers la Belgique. Nous arrivons dans un hôtel proche de l’aéroport de Charleroi vers 19h30 où nous passons la nuit.
Lendemain matin, mardi 4 mai 2021. D’après Ti’Paul : « les belgicains sont très sympas« . Les enfants adorent dormir à l’hôtel. Ça leur rappelle leurs excursions avec Mamie Christine pendant les vacances. Ce matin, il pleut et le vent souffle fort. La dépression est arrivée en Mer du Nord et s’installe pour quelques jours en se déplaçant vers le Danemark. Après quelques kilomètres, notre belle voiture rouge a des problèmes. le compte-tours s’emballe plusieurs fois, sans action de ma part sur l’accélérateur… L’embrayage sur lequel nous avions quelques doutes juste avant notre départ a des faiblesses. Nous l’avions pourtant fait tester par notre garagiste. Celui-ci par téléphone nous conseille de nous arrêter quelques jours pour réparer. Il ne nous reste que quelques kilomètres pour nous décider, car, si nous nous arrêtons en Allemagne, c’est quarantaine obligatoire de 10 jours pour tous. Claire passe quelques coups de fil aux garages à proximité de Liège et explique notre situation : pas de place avant le 25 mai… Quelques échanges rapides entre nous, et nous décidons de finalement poursuivre la route. Peut-être qu’en cas de casse de l’embrayage, les 80km/h de vent qui souffle par l’arrière nous porterons jusqu’en Suède 😉 Pour se remonter le moral et se changer les idées, nous continuons la série de podcast originale de France Inter consacrée à Napoléon : « l’Homme qui ne meurt jamais » (on vous la conseille).
Vers midi, au niveau de Düsseldorf, nous voilà pris au piège sur un échangeur d’autoroute qui rend fou ! En suivant le GPS, nous faisons le tour des bretelles, une par une, dans un sens puis dans l’autre, comme prisonnier d’un dessin aux perspectives impossibles d’Escher. Nous comprenons finalement que la suite de l’autoroute est fermée aux véhicules de plus de 3,5T, information qui, en allemand, nous avait échappée plus tôt… Demi-tour ! Claire nous trouve un itinéraire alternatif plus au nord, grâce à une bonne vieille carte papier. Les enfants restent cool malgré ce détour de près de 100kms, et nous relançons la motivation par quelques épisodes de podcast des Odyssées et de Olma.
Vers 19h30, nous gagnons enfin le nord de l’Allemagne et les rives de la mer Baltique à Travemünde, où nous devons embarquer sur le ferry TTLine de 22h en partance pour Trelleborg en Suède. Dernier suspens de la journée : la voiture -et son embrayage fatigué- pourra t-elle monter la longue et pentue rampe d’embarquement ? Sous les encouragements des dockers, nous embarquons finalement sans encombre à bord. L’intérieur du ferry est magnifique, Claire et les enfants « se croient sur le Titanic« . Je leur rappelle rapidement le destin funeste de ce dernier, et après avoir déposé nos affaires dans notre cabine, nous gagnons le bar situé sous la passerelle pour profiter d’un verre bien mérité en famille. Nous nous endormons ensuite bercés par le doux ronflement des moteurs et le très léger roulis du ferry malgré les 35 noeuds qui soufflent dehors.
Au réveil, nous sommes en Suède ! Nous débarquons du ferry et regagnons la terre ferme et le poste de contrôle des douanes. Nous sommes le mercredi 5 mai, il est 7h43, soit 47 heures et 43 minutes après notre test PCR réalisé à La Rochelle le lundi matin. Les douaniers manquent de s’étrangler en constatant ce timing très serré, et, avec un large sourire, nous ouvrent la barrière. 17 minutes plus tard et nous étions bons pour reprendre le ferry en sens inverse. Quelques kilomètres plus loin, premier arrêt dans une station essence suédoise. Mes yeux s’émerveillent : des saucisses grillent sur un barbecue à l’intérieur de la station et nous pouvons enfin nous débarrasser des masques et profiter des sourires des suédois !
C’est fatigués mais « gonflés à bloc » que nous reprenons la route pour cette dernière étape du convoyage, au son des « Aventures rocambolesques d’Edouard Baer et de Jack Souvant« . C’est un podcast complètement foutraque d’Inter, qui débouche les oreilles ! A 16h nous arrivons à notre destination, point de départ de notre aventure à la voile : la Marina de Slottsholmen à Västervik. L’embrayage a tenu bon ! Quelques minutes suffisent pour rencontrer notre contact sur place, Andreas, directeur de la Marina. 1 heure plus tard, la remorque et le bateau sont garés en attente du grutage prévu le lendemain, et nous nous installons pour une nuit à la GuestHouse située sur le port. Le soir même nous redécouvrons un plaisir trop longtemps oublié : un bon resto !
Jeudi 6 mai au matin, nous suivons Andreas avec la remorque jusqu’à un petit chantier naval situé au sud de Västervik. En quelques minutes le bateau est à l’eau. Nous nous équipons et commençons à préparer le bateau afin de le ramener par la mer à la Marina. Les enfants jouent entre les bateaux en bois posés à terre pendant que Claire et moi nous attaquons à la fixation du moteur hors bord, déposé de sa chaise pour le transport. En le pré-positionant, le moteur glisse de son logement vers l’arrière et une partie de ma main gauche se retrouve coincée entre le moteur et la chaise. En quelques dixièmes de seconde, je bascule à la mer avec le moteur, suivi juste après par Claire qui tente encore de le rattraper. Je ne sais pas ce qui m’a le plus surpris : la morsure de mon premier contact avec la mer Baltique, le bruit du moteur qui se remplit d’eau, ou la sensation de fort pincement sur mon doigt ? Quelques minutes plus tard, avec l’aide des anciens du chantier, nous sommes sur la berge en sécurité, le moteur est ramené à bord, mais nous sommes trempés et j’ai visiblement une fracture ouverte de l’annulaire de la main gauche. On reste calme, on rassure les enfants, et me voilà parti vers l’hôpital, dégoulinant dans le break Volvo du propriétaire du chantier, suivi par Claire -elle aussi mouillée- et les enfants dans notre voiture.
Nous sommes parfaitement accueilli à l’hôpital de Västervik. COVID oblige, Claire et les enfants ne peuvent me suivre à l’intérieur et retournent à l’hôtel. Après un bilan radio et quelques discussions entre les médecins, tous s’accordent pour privilégier l’amputation de la phalange touchée. Une anesthésie locale, un rapide « au revoir » amical à mon bout de doigt, et quelques points de suture plus tard, toute la famille est à nouveau réunie devant l’hôpital. Avant de regagner l’hôtel, nous faisons un crochet par le chantier naval pour ranger un peu le bateau et récupérer des affaires et des chaussures sèches restées à bord. C’est en pyjama offert par l’hôpital que je m’offre malgré tout une photo souvenir de cette journée « de merde« .
Un immense « merci » aux anciens du chantier, à Andreas et toute l’équipe de la Marina pour leur aide dans cette mésaventure. Grâce à eux, le bateau est maintenant à quai à la Marina, tranquillement en attente de son équipage. Nous nous sommes installés pour la semaine à la GuestHouse, en attente d’une consultation de contrôle avec le chirurgien jeudi 13 mai. Les enfants profitent de l’ambiance locale et des ballades sur les dalles de granite en bord de mer.
Cet accident va bien évidemment modifier nos plans initiaux pour les quelques jours/semaines à venir. L’avantage d’un voyage de quatre mois, c’est qu’on a du temps ! Rassurez-vous, je suis loin d’être abattu et compte bien ne pas en rester là. On a déjà plein d’idées pour nous occuper pendant le temps de cicatrisation nécessaire avant de pouvoir prendre la mer. On vous tiens au courant ! D’ici là, si parmi mes amis grimpeurs, certains ont le numéro de téléphone du grimpeur américain Tommy Caldwell, je suis preneur ! J’aurais surement besoin de ses conseils pour me remettre à l’escalade avec une phalange en moins 🙂 Et comme dirait Nietzsche « Amor Fati » !
Avec un mois de retard -qui aura fait quelque peu monter la tension- la toute nouvelle remorque du bateau est enfin arrivée à La Rochelle. Après quelques sorties en mer de réglages, dé-réglages et re-réglages, il est désormais temps de démâter le bateau, de le sortir de l’eau, et de croiser les doigts suffisamment forts pour qu’il s’adapte à la remorque. Le dématâge ne pose pas de problème. Le Maxus 24 est pensé pour être mâté/démâté régulièrement. Il nous aura suffit de bricoler une potence de 3 mètres pour contrôler la descente du mât et d’un système de frein pour le retenir. Avec l’aide de notre pote HP, nous en profitons pour tester le re-mâtage du bateau afin de vérifier que nous pourrons le faire à deux une fois arrivés en Suède : à part le fil électrique du feu de mât que nous venons de couper, l’opération se réalise sans encombre. En quelques minutes le mât est amené en bonne position sur le bateau, paré au grutage !
Afin de prendre le temps de caler la remorque et ses chandelles au bateau, nous utilisons la grue électrique du port des Minimes pour sortir le bateau de l’eau. HP et Alex ont le certificat pour son utilisation en autonomie. Avantage des restrictions sanitaires actuelles : le port est presque vide et personne n’utilise la grue en cette chaude et magnifique journée de « juinvril ». Un autre ami arrive. Stéphane débarque sur l’aire de grutage pour nous filer un coup de main. Après quelques réglages, sous les yeux des enfants et de leur grand-mère qui les garde, Amor Fati prend son envol.
Amor Fati est un Maxus 24 biquille. Afin d’éviter de poser les quilles sur les gardes-boue de la remorque, on nous a conseillé un modèle large, au maximum du gabarit routier autorisé en Europe, soit 2,55 m (c’est une remorque porte-bateau WVA Vlemmix GT2702L8VQ 2700/ 2000kg, longueur 8m40). A quelques centimètres près, elle se retrouve malgré tout trop étroite et nous devons rehausser le fond avec de nouveaux bastaings pour éviter de se poser sur les montants extérieurs en acier. Avec l’aide de nos amis, en quelques heures, le bateau est équilibré, sanglé sur sa remorque et attelé à notre voiture face au tout nouveau « Sailing Lab » de Tribord. Ce centre de recherche et développement pour la marque Voile de Decathlon, vient de choisir La Rochelle comme port d’attache. Tribord nous accompagne dans notre aventure par une dotation matérielle pour tout l’équipage et le navire. Nous les en remercions chaleureusement !
Malgré nos inquiétudes, notre voiture rouge, un monospace Kia Carnival de 185 CV, semble bien accepter ce nouveau passager accroché à l’arrière, et nous rejoignons tranquillement une autre partie du port où nous devons stationner dans l’attente du départ. Claire étant maintenant libérée de l’hôpital pour quatre mois nous allons nous consacrer aux travaux à sec sur le bateau, à la préparation des affaires et au rangement de la maison. Le départ est pour le moment maintenu au 3 mai (dès la fin des restrictions de circulations en France). La décision de maintenir cette date ou de la décaler de quelques jours sera prise avant la fin de semaine, à la lumière des prévisions météo attendues sur la route et des éventuelles annonces gouvernementales à venir. Affaire à suivre !
Un grand merci à : Eric, HP, Stéphane et Mamie Christine, pour leur aide précieuse dans la préparation et la réalisation de cette « journée clé » avant le début de notre voyage ! Merci également à eux pour leur photos dont la plupart des présentes sont issues. Comme dirait Blanche : « on vous fait plein de coeurs, plein de bisous » !